Le champ de l’histoire de l’art : Les arts plastiques
Arts libéraux et arts mécaniques
L’art — ars — c’est d’abord un savoir-faire. C’est-à-dire une succession d’opé- -stions portées sur un donné afin de le transformer. La distinction et la hiérarchie entre les arts ainsi compris, se fondent sur l’appréciation de leur degré de libéralité. L’art est dit libéral ou mécanique selon que son savoir-faire et ses finalités sont plus ou moins triviaux. D’autres oppositions permettent d’affiner la discrimination : spirituel ou manuel, intelligible ou sensible, désintéressé ou utilitaire. À l’intérieur de ces deux grandes classes, les mêmes critères permettront d’établir de subtiles taxinomies entre les pratiques artistiques, les objets, et les artistes eux-mêmes; le statut social de ces derniers dépendra de la libéralité de leur art. Ainsi la peinture n’accédera au rang d’art libéral qu’en s’efforçant de répondre aux exigences de la théorie de YUtpictura poesis, c’est- à-dire en démontrant qu’elle peut tenir un discours équivalent à celui de la poésie, voire de la philosophie. Cette distinction —toujours hiérarchisée — est prise dans l’histoire et se traduit par un ensemble d’appellations aux connotations plus ou moins valorisantes. L’art est majeur ou mineur, beau ou décoratif, ou appliqué, voire industriel.
Les distinctions contemporaines peuvent paraître moins dogmatiques, d’une part parce que les arts populaires ou traditionnels ont été réévalués, d’autre part parce que le champ artistique intègre toute sorte de pratiques et de matériaux. Mais surtout, c’est la définition de la notion d’« art » et le processus de légitimation des objets relevant de ce champ qui ont été profondément modifiés.
Aujourd’hui, les arts plastiques désignent les arts servant à l’expression libre de la pensée, « plastique » signifiant étymologiquement « qui peut être modelé, mis en forme ». Les arts plastiques visent la production d’un objet à la fois sensible, matériel, tactilo-visuel, et intelligible, résultat de la formation ou de la transformation d’une chose en une autre, d’une idée en une autre. Cette production s’effectue à l’intérieur du champ artistique propre à un domaine technique et culturel, en impliquant directement son auteur par l’engagement de son corps et de son esprit.
Les beaux-arts
Le terme réunit les pratiques que Vasari, au xvi’ siècle, avait d’abord appelées « arts du dessin », puis « très beaux arts » pour les distinguer des arts mécaniques. Au XIXe siècle, l’appellation est institutionnalisée dans le mouvement de réforme des académies et la création des musées. L’École des beaux-arts remplace l’Académie royale de peinture et de sculpture, les musées des beaux-arts se distinguent de ceux d’histoire naturelle, au sein des grandes expositions universelles sont ouvertes des sections des beaux-arts.
Aujourd’hui le terme est tombé en désuétude, même s’il demeure pour désigner certaines écoles d’art; mais à l’intérieur de ces dernières on préférera l’appellation arts plastiques pour désigner les pratiques autres que le design ou la communication visuelle.
L’apparition puis la quasi-disparition de cette catégorie sont la marque des efforts accomplis par les artistes pour conquérir la reconnaissance de la dimension libérale de leur activité, qui n’a pu se réaliser qu’en mettant l’accent sur son caractère esthétique. L’appellation est donc également significative des limites assignées à ces arts, dans leur prétention à être reconnus comme intellectuels. Les arts du beau ne sont pas ceux de la pensée, même si l’on exige qu’ils puissent à la fois « instruire et distraire ». Le terme « arts plastiques » qui s’impose désormais, et qui fit son entrée à l’Université en 1968, par sa généralité, indique que le « beau » n’est plus leur seule finalité et qu’ils intègrent d’autres pratiques : la photographie, la vidéo, voire les arts du spectacle. On peut remarquer que c’est au moment où les activités humaines ont tendance à se spécialiser de plus en plus radicalement que les catégories artistiques se défont, que leurs limites s’effacent, comme pour préserver un domaine dans lequel l’homme manifesterait sa relation au monde sans barrières épistémologiques.
Vidéo : Le champ de l’histoire de l’art : Les arts plastiques
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