Controler l'aménagement urbain,empécher le laisser-faire
Les dessins de Hugh Ferriss n’appartiennent pas au registre de figuration de la propagande des moyens destinés à empêcher les accidents de la circulation. Ferriss, dont les dessins illustrent régulièrement les articles consacrés aujourd’hui à l’histoire de la ville américaine, est ingénieur. Il part des exemples de gratte- ciel construits au tournant du siècle pour imaginer la ville du futur. À ce titre, il s’inscrit dans une démarche théorique ayant pour but de fournir des supports visuels pour faire réfléchir et rêver ses contemporains. En réalité, plus qu’un catalogue de belles images, Ferriss se livre à un plaidoyer contre le laisser-aller en matière d’aménagement urbain. S’il souligne la qualité de certaines réalisations, il regrette l’absence de vision d’ensemble qui caractérise, selon lui, la ville américaine dans la première moitié du XXe siècle. Pour lui, la transformation de tout un quartier est a priori indispensable pour imaginer la ville de demain.
En ce qui concerne le problème de la circulation automobile, Ferriss se montre très critique : la congestion automobile empire chaque jour dans les villes ; excepté à Détroit où l’on envisage la construction d’une autoroute, rien n’a été entrepris pour l’améliorer. A propos des autoroutes à plusieurs niveaux en milieu urbain, il estime ironiquement, dans une vision prémonitoire du projet de Gedes, que l’on réalisera ainsi un paradis pour constructeurs automobiles!
Ferriss préconise un zoning qui évite la trop grande proximité des gratte-ciel : il propose de les isoler au milieu d’habitations plus basses ; la ville est conçue comme un spectacle à admirer d’un balcon dans une vision qui se rapproche du diorama pour « une ville contemporaine de trois millions d’habitants » exposé au pavillon de l’Esprit nouveau en 1925 par Le Corbusier qui, comme Gedes, travaille à cette occasion pour un constructeur d’automobiles.
Les deux visions de la « ville du futur » que nous venons d’examiner ne s’intéressent pas aux moyens d’y parvenir : ces deux images tirent leur force de leur caractère utopique. Si elles sont parvenues en France, elles ont pu alimenter l’imaginaire des concepteurs des dalles de La Défense ou du Front-de-Seine. A la différence de la ville de trois millions d’habitants de Le Corbusier, Gedes relie les infrastructures de circulations avec les immeubles qu’elles desservent.
Lorsque, en 1967, Paris-Match publie un numéro consacré au « Paris futur», ce ne sont plus des utopies qui sont présentées mais, d’une certaine manière, la réalisation de ces utopies. Que voit-on en effet dans ce numéro ? « Des dessins vérités où le moindre détail a été vérifié. » Ceux-ci sont publiés avec l’accord de Paul Delouvrier, délégué au district de Paris, nommé par le général de Gaulle. Il s’agit donc d’une figuration qui se veut réaliste. Certains de ces dessins ressemblent aux images de Norman Bell Gedes. En particulier, dans la vue à vol d’oiseau présentant La Défense, on retrouve les immeubles tours presque identiques, ainsi que le réseau de passerelles qui permettent de les enjamber. La dalle, quant à elle, ressemble à une sorte de pont le long duquel se trouvent les immeubles, et non à un sol artificiel continu, ce qu’elle devient par la suite. On est aussi frappé par le petit nombre de véhicules qui circulent sur le futur boulevard circulaire de La Défense.
Vidéo : Controler l’aménagement urbain,empécher le laisser-faire
Vidéo démonstrative pour tout savoir sur : Controler l’aménagement urbain,empécher le laisser-faire
https://www.youtube.com/embed/mgdirlX6HFo