Des mots aux choses:qu'est-ce qu'un espace vert ?
Nous avons vite constaté que la notion de « morceaux de ville » fondée sur celle d’« espace vert illimité » n’était pas très claire. A première vue, cette confusion nous a paru liée à l’ambiguïté de la langue française qui mélange deux notions (pas si étrangères l’une à l’autre) : « espaces verts » au pluriel et « espace vert » au singulier. D’une part, un vocable d’origine quantitatif qui couvre toutes sortes de promenades, jardins, parcs, etc., faisant partie – à l’origine – de la texture urbaine traditionnelle ; d’autre part, l’élément qualitatif fondamental de la texture urbaine dite moderne. Pour mieux comprendre cette nuance d’ordre sémantique, nous avons effectué une petite étude lexicographique. Nous avons constaté, par exemple, que la Charte d’Athènes n’emploie jamais le vocable « espace vert » (on y parle seulement de « surfaces vertes » ou de « zones de verdure »), pour la bonne raison que celui-ci apparaît plus tardivement – peut-être au moment même où on commence à critiquer le type d’urbanisme fondé sur cette notion. En revanche, le Petit Robert se fait l’écho de cette distinction, avec un certain décalage par rapport à l’usage professionnel. Dans son édition de 1973, sous l’entrée « espace », ce dictionnaire mentionne l’expression « espaces verts » et la définit comme des « jardins dans les villes ». Dans son édition de 1993, l’optique a changé et, toujours sous la même entrée, on signale l’expression « espace vert » (au singulier) expliquée comme une «surface3 réservée aux jardins (arbres, gazons…) ménagée entre les constructions, dans l’urbanisme moderne ».
Toutefois, ce ne sont pas seulement les mots qui manquent de clarté, mais aussi les choses. Car nos interlocuteurs qui nous ont signalé des lieux non fondés sur la notion d’espace vert illimité ont en fait souligné un phénomène essentiel : que la différence entre textures traditionnelles et textures modernes n’est pas aussi tranchée. C’est donc le passage d’une texture à l’autre en une sorte de « dégradé » qu’il faudrait expliciter. Comprenant cela, nous avons décidé d’infléchir notre travail et d’abandonner l’idée d’étudier exclusivement les textures fondées sur la notion d’espace vert illimité pour suggérer plutôt la grande variété des morphologies urbaines de ce siècle, qui mélangent de manière très différente voirie, bâtiments et espace(s) vert(s).
Vidéo : Des mots aux choses:qu’est-ce qu’un espace vert ?
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