L’anamorphose
L’anamorphose:
Le peintre dessine l’anamorphose à l’aide d’une grille géométrique qui déconstruit les images. Cette déformation est ensuite «redressée » par le spectateur qui, au moment de la lecture du tableau, doit se placer à un certain angle de vue ou s’aider d’un miroir pour retrouver les justes proportions du motif.
La perspective curieuse:
Le terme « anamorphose – apparaît au XVII siècle. Il désigne le procédé de déformation des images qui oblige le spectateur à rétablir le réalisme du dessin en regardant le tableau sous un angle de lecture déterminé. La perspective anamorphosique se développe aux XVI et XVII siècles en France. Liée à l’idée d’artifice, elle est admirée dans les cabinets de curiosités, c’est un merveilleux secret connu seulement de quelques initiés. Retrouvée par les surréalistes et les artistes du XX siècle, elle sert aujourd’hui à questionner le spectateur sur la perception du réel, la multiplication des sens et l’ambiguïté de la vision.
La vision oblique:
Au XVI siècle, dans les premières anamorphoses, l’image est allongée géométriquement pour perdre son aspect figuratif. Le spectateur ne découvre le sujet que dans une position de lecture « en oblique », sur le côté tangent du tableau. Exploité en décoration architectonique, le motif est projeté sur toute la longueur du mur d’un couloir. Le spectateur, en se déplaçant, perçoit alors différents motifs.
Les effets de miroir(anamorphose catoptrique)
À partir du XVII siècle, un nouvel outil, le miroir, est utilisé. Il va aider le spectateur à rétablir le bon angle de vision. Placé sur l’image, convenablement incliné, il redonne à l’objet
ses proportions normales.
C’est aussi un miroir cylindrique ou conique, posé au milieu d’une image circulaire très déformée et inversée.
La manipulation est simplifiée : l’angle de réflection (l’inclinaison du miroir) remplace l’angle de vision (position décentrée du spectateur).
Le dessin entoure la base du miroir, il est déformé, arrondi et dilaté. L’observateur perçoit simultanément l’image de l’objet déformé et son reflet redressé dans la glace.
les images secrètes:
Un tableau traditionnel…
Hans Holbein (v. 1497-1543) représente deux jeunes ambassadeurs français à la cour du roi d’Angleterre : Jean de Dinteville, seigneur de Polisy (29 ans), en veste à fourrure d’hermine, une dague à la main droite, et Georges de Selve (24 ans), évêque de Lavours, en soutane et bonnet carré.
Ils s’appuient de part et d’autre d’une table recouverte d’un tapis avec des objets symboliques : des appareils pour observer et mesurer le monde (globe céleste, instruments d’astronomie, horloge solaire, globe terrestre, équerre, compas), des livres et un instrument de musique (luth). Cette nature morte expose les outils de la science et les attributs du monde terrestre éphémère.
… mais avec une image secrète
Une forme ovoïde flotte en diagonale, en bas au milieu du tableau. Le spectateur doit alors chercher l’endroit le plus propice pour « redresser » cette anamorphose et reconnaître (en regardant le tableau en vision oblique) l’image d’un crâne. Cet ossement est ici pour Holbein la représentation métaphorique du triomphe de la mort sur les hommes de culture, de pouvoir et de science.
Il oppose la vanité scientifique des hommes à la vérité céleste de Dieu (évoquée par un petit crucifix d’argent en haut à gauche, discrètement caché par le rideau de soie du fond).
La mosaïque du tableau reproduit presque à l’identique la décoration du pavement, alors récent, du sol de l’abbaye de Westminster.