La main-d'œuvre
Une forte présence de femmes et d’immigrés
□ Les immigrés forment la seconde population de ce secteur. Les juifs d’Europe de l’Est, installés dès le xixe siècle, ont été rejoints par d’autres vagues migratoires au xxe (Arméniens, juifs de l’empire ottoman, juifs d’Afrique du Nord, Yougoslaves, Italiens, Turcs, Pakistanais, ressortissants d’Asie du Sud-Est). Ces populations, qui ont dynamisé le secteur, forment une mosaïque pluri-ethnique qui renvoie l’image d’une industrie archaïque propice au trafic de main-d’œuvre.
La hiérarchisation des tâches
□ Le processus de fabrication d’un vêtement suit toujours la même logique : le traçage, le matelassage, la coupe, la distribution des paquets ou « bûches », l’assemblage, le repassage, le contrôle et le conditionnement. À chacun de ces postes cor- respont une hiérarchisation des tâches.
□ Les ouvrières de montage ou mécaniciennes sont chargées de l’assemblage du vêtement. En haut de la hiérarchie, l’ouvrière qualifiée monte un vêtement en entier sans utiliser de guides ni d’attaches. Certaines tâches requièrent des compétences particulières (montage du col ou des manches), d’autres ne nécessitent aucun savoir spécifique (surfilage, montage des doublures) et sont exécutées par des ouvrières débutantes ou non qualifiées.
D Les techniciennes et agents de maîtrise (TAM), représentées par les contremaîtresses, sont chargées de résoudre les problèmes de production. Elles sont l’intermédiaire entre le responsable de production et l’ouvrière.
La revalorisation des métiers
□ L’industrie de la transformation des étoffes est en pleine mutation. Certaines fonctions (plaçage, matelassage et coupe) sont appelées à disparaître pour être remplacées par des logiciels informatiques et des découpes laser. Le savoir-faire va laisser la place à des fonctions de contrôle et de manipulation.
D Contrairement aux postes en marge de la production, il n’y a pas eu de progrès pour les postes d’assemblage. Les machines automatiques ont simplifié le travail des ouvrières, mais sans les remplacer. Le travail reste répétitif, parcellaire, car il n est pas besoin de savoir monter un vêtement en entier, et soumis au rendement. La tendance à la polyvalence (utilisation de diverses machines) exige des ouvrières une adaptation rapide aux changements de séries et un maintien du degré de qualité, revalorisant ainsi ces postes.
La délocalisation
■ Principes de délocalisation
■ Coût de la main-d’œuvre
La recherche de prix de façon toujours plus bas a vu émerger depuis quelques années de nouveaux pays producteurs à faibles coûts salariaux. À titre de comparaison, une heure de travail en France revient à 75 F, en Chine ce prix descend à 1,30 F, au Pakistan à 1,20 F, et ne coûte plus que 0,70 F au Bangladesh. Si la main-d’œuvre est essentiellement constituée de femmes et d’enfants travaillant sans protection sociale, ces pays ont vu s’industrialiser une partie de leurs régions. L’Asie (Chine, Thaïlande, Viêtnam, Indonésie), l’Europe de l’Est (Pologne, République tchèque, Roumanie), l’Amérique centrale (Mexique, Guatemala) forment la liste non exhaustive de ces nouveaux pays producteurs.
« Délocalisation locale » et travail dissimulé
Ce phénomène a conduit les entreprises qui ne peuvent se permettre de délocaliser à l’étranger, faute de moyens, à imposer à leurs sous-traitants des prix si bas que ces derniers n’ont eu d’autre solution que le travail clandestin et l’allongement de la journée de travail, qui dépasse les huit heures, pour atteindre, en période de demande, quinze heures. Ces pratiques sont illégales en France, et le donneur d’ordre est autant responsable que son sous-traitant en cas de fausse déclaration. Les contrevenants risquent, en cas de contrôle, une condamnation pour trafic de main-d’œuvre.