Les mouvement dans la peinture : Photographie d'art
CONTEXTE
Dès l’invention de la photographie (daguerréotype en 1839, calotype en 1841), des relations se nouent entre la photographie et la peinture, celle de la dépendance d’abord (Baudelaire se faisant l’écho’ de son temps, considère la photographie comme la servante de la peinture), puis la confrontation et l’échange jalonnent l’histoire de l’image jusqu’à nos jours.
La Documenta 5 de Kassel, en 1972, consacre la photographie comme discipline artistique à part entière et instaure son statut d’image, non plus seulement comme empreinte du réel. Roland Barthes (1915-1980) étudie sa spécificité dans la Chambre claire en 1980. Dès ce moment, la pratique photographique se modifie en interrogeant sa nature propre et intervient à nouveau dans la peinture.
Notamment, le terme de photo-réalisme attaché au courant américain de l’hyperréalisme (> HYPERRÉALISME), évoque la pratique d’artistes entre 1965 et 1970 qui exécutent leurs tableaux en transférant fidèlement sur la toile des épreuves photographiques (images projetées, mise au carreau). Ils obtiennent une précision glacée pour rendre compte objectivement de la réalité du monde moderne. Andy Warhol (1928- 1987) pose également un regard sur la société en prenant la photographie comme modèle. Contrairement à ceux-ci, l’artiste contemporain Gerhard Richter (né en 1939) crée des tableaux photo-réalistes dans l’optique d’un questionnement de la peinture avec la notion d’image pure. On observe également des tentations picturales dans la démarche de photographes contemporains, tels que Christian Milovanoff (né en 1948). Mais également, au début des années 1980, les appellations de « tableau photographique » ou « photo-tableau » s’appliquent à une conception de l’image photographique selon le modèle de la forme du tableau, dans les démarches de Jean-Marc Bustamante (né en 1952) en France et de Jeff Wall (né en 1946) au Canada.
ARTISTES
PICTORIALISME
Le pictorialisme est un mouvement international actif entre 1890 et 1914. Les photographes revendiquent le statut d’artiste et réalisent des photographies d’art enrichies grâce aux procédés pigmentaires (charbon, gomme bichromatée, encre grasse). Le flou, qui caractérise soient les images pictorialistes (Edward Steichen, 1879-1973), est travaillé à la prise de vue et interprété au moment du tirage, avec la gomme et le
pinceau, par adoucissement des contours, accentuation des lumières et élimination des détails. Les artistes photographes s’insurgent contre la vulgarisation et la prolifération de la photographie à la fin du XIXe siècle, permises par la technique et le processus mécanique. Ils pensent que toutes ces images du réel n’appréhendent pas le réel sous son aspect esthétique. La photographie pictorialiste doit être subjective, tamisée, émotionnelle… et unique. Les Français Robert Demachy (1859-1936). Constant Puyo et l’Américain Alfred Stieglitz (1874-1946) diffusent le pictorialisme et défendent le statut de la photographie comme art à part entière.
PHOTOGRAPHIE « PLASTIQUE »
Pendant l’entre-deux-guerres, la photographie s’intègre aux avant-gardes internationales. Le décloisonnement des arts favorise les relations entre artistes de disciplines différentes et génèrent des talents polyvalents. Les artistes travaillent ensemble. Les photographes sont aussi plasticiens et/ou peintres, sculpteurs, comme Hans Bellmer (1902- 1975), César Domela (1900-1992), Man Ray (1890-1976), Robert Tatin (1902-1983) en France, Florence Henri, Laszlo Moholy-Nagy (1895- 1946) en Allemagne, Alexandre Rodchenko (1881-1956) en U.R.S.S. Certains réalisent des « photomontages », technique dadaïste, allemande d’origine, qui juxtapose des clichés découpés puis parfois rephotographiés. Les sujets sont contestataires, sociaux et politiques (John Heartfield, Helmut Herzfelde, 1891-1968, Gustav Klucis, 1895-1942), poétiques (Max Ernst, 1891-1976). Des artistes constructivistes créent des illustrations d’ouvrages (El Lissitsky, 1890-1941, Rodchenko), les surréalistes présentent une nouvelle conception de la réalité (Man Ray et les polarisations, Frederick J. Kiesler, 1896-1966, Marcel Marien, né en 1920). Dans les années 1970, l’art de la performance n’existe que dans l’instant, les photographies en conservent la mémoire (actionnistes viennois, 1962-1968 ; Jochen Gerz, né en 1940). La notion d’événement dans la pratique artistique qui prend un essor à la fin des années 1960, remet en question les domaines plastiques traditionnels et la photographie retient la trace de l’œuvre. Il en est ainsi pour les emballages éphémères et à l’échelle du paysage de Christo (né en 1935) de même que pour les déplacements et les sculptures que Richard Long (né en 19451 réalise dans la nature. Les deux artistes accordent d’ailleurs un statut d’œuvre d’art à ces photographies.
PHOTOGRAPHIE ESTHETISANTE
Depuis la fin des années 1960, surtout aux États-Unis et en Europe, des photographes de revues de mode puis de publicité, recherche l’esthétisme et la plastique dans la photographie. Richard Avedon (né en 1923) exalte surtout le corps de la femme. Irving Penn (né en 1917) représente notamment des objets banals et non photogéniques de la vie quotidienne (mégots, poubelles) qu’il parvient à rendre esthétiques. Robert Mapplethorpe (1946-1989) réalise des images parfois érotiques.
PHOTOGRAPHIE MANIPULÉE
La photographie manipulée (manipulations nouvelles) apparaît dans la seconde moitié des années soixante-dix, aux États-Unis et en Europe. La manipulation peut s’effectuer pendant la prise de vue (photographie fabriquée), lors de la mise en scène (Duane Michals, né en 1932 ; Cindy Sherman, née en 1945 ; William Wegman, né en 1942) ou pendant le tirage (interventions manuelles sur les négatifs, procédés chimiques, etc.) ou plus tard encore par des retouches de dessin ou de peinture sut les tirages (Georges Rousse, né en 1947). Les photographes créent des atmosphères artificielles d’un monde miniaturisé avec figurines et jouets (Ellen Brooks, née en 1946 ; Alain Fleischer, né en 1944) mais aussi en accentuant volontairement. À la peinture, un lieu émotionnel, par exemple, un poste de premiers secours par John Divolo (né en 1949). Parmi eux, Arnulf Rainer (né en 1928) recouvre de peinture des photographies aux thèmes corporels, Joel-Peter Witkin (né en 1939), Lucas Samaras (1936-1980), Robert Cumming (né en 1943), etc.
PHOTOGRAPHIE-TABLEAUX/NARRATIVE ART
La galerie John Gibson conçoit deux expositions à New York, en 1973 et 1974, intitulées « Story » et « Narrative », qui regroupent les Américains David Askevold, John Baldessari (artiste conceptuel, né en 1931), le Britannique David Tremlett (né en 1945), le Français Jean Le Gac (né en 1936). Bruxelles présente « Narrative Art » en 1974, l’Italie expose notamment les photographies du Français Christian Boltanski (né en 1944). Ce mouvement international se manifeste jusque vers 1979. Narrative Art présente des thèmes narratifs de la vie quotidienne, parfois personnels. Les textes-légendes des photographies disent autrement ce qu’elles représentent. La photographie-tableau sert de mémoire ou d’instrument critique. Parfois aussi des dessins au crayon ou au pastel complètent le message donné par le cliché laissé tel quel ou retouché à l’acrylique. Photographie, texte et dessin associés constituent les photographies-tableaux.
Vidéo : Les mouvement dans la peinture : Photographie d’art
Vidéo démonstrative pour tout savoir sur : Les mouvement dans la peinture : Photographie d’art
https://www.youtube.com/embed/syUjfNi3q8Q