Les mouvement dans la peinture : Art informel: l'art informel
CONTEXTE
L’art informel s’épanouit en Allemagne dans les années cinquante et soixante. Sous cette appellation se regroupent ensuite différentes formes d’abstraction, de constructions éclatées : la calligraphie, le tachisme, l’art brut et l’art japonais Gutaï. En 1951, le critique d’art Michel Tapié organise une exposition à Paris sur le thème « Tendances extrêmes de la peinture non figurative ». Il qualifie d’« informelle » l’« improvisation » psychique, ce qui n’a pas de forme déterminée et possède encore des connotations surréalistes. Le terme « informel » désigne un certain type de peinture contemporaine (excepté l’art de Kandinsky), qui ne doit rien au passé et ne subit aucune influence contemporaine ni par le sujet ni par la représentation. André Malraux est l’un des écrivains qui a soutenu avec intérêt l’art informel. Ce courant s’étend en France puis en Espagne.
CARACTERISTIQUES
Les premiers tableaux informels sont des petits formats et des dessins rehaussés d’aquarelle sur papier. Le format détermine la décomposition de l’œuvre et les artistes optent très rapidement pour de grandes toiles. La peinture à l’huile, épaisse, est posée au pinceau, à la spatule, au couteau ou sort directement du tube. L’artiste refuse toute figuration explicite et privilégie les taches, les traces et les matières enchevêtrées. Il détruit volontairement la forme par la matière et la couleur au fur et à mesure qu’elle apparaît. Réaliser une toile revient à laisser surgir une forme de la matière. Le trait devient convulsif, les couleurs s’agglutinent, coulent, se recroquevillent. La matière donne une vie à la couleur.
ARTISTES
LES INFORMELS
France
Wols (Wolfgang Schulze, dit, 1913-1951), d’origine allemande, montre l’expression pathétique de son existence. Entre expressionnisme et surréalisme, son écriture serrée, ses lignes denses, ses formes rigoureuses sur des fonds aquarellés et impalpables se colorent de teintes pâles, roses, bleues et jaunes.
Jean Fautrier
(1898-1964) est en 1945 le principal initiateur de l’art informel avec l’Allemand Wols. Ses œuvres sont insolites, constituées de papiers recouverts d’enduits de matériaux hétérogènes. La masse de couleurs délavées, grises, empâtées, atomisées évoquent souvent les massacres nazis (la série Otages).
Jean Dubuffet
(1901-1985) (—» ART BRUT) peint « des graffitis hâtifs, forcément incisés dans l’épaisseur d’une pâte informelle (…) » (Jean- Pierre Greff, historien de l’art).
Camille Bryen
(1907-1977), sur des fonds de toiles badigeonnés, réalise des signes et des tracés violents, des projections et des coulures à la peinture à l’huile.
Georges Mathieu
(né en 1921) réalise des œuvres de très grand format composées de taches de couleurs parcourues de filets de lumière. De ses tubes de couleurs pures, sortent ses « écritures » sur des fonds unis. Il intervient aussi avec la brosse, le pinceau et même la main. Malraux voyait chez Mathieu « le calligraphe de l’occident » (voir ci-dessous les CALLIGPAPHES).
Frédéric Benrath
(né en 1930), figure du NUAG1SME (1953-1966), soutenu par le critique Julien Alvard, s’abandonne au mouvement cosmique, à la nature, aux quatre éléments par une approche philosophique orientale. Après les atmosphères transparentes de Turner, de Monet et des peintres chinois, viennent celles des nuagistes. Ils privilégient les teintes fluides et diffuses à dominantes bleues et grises. Benrath, René Duvillier, Pierre Graziani, René Laubiès, Marcelle Loubchansky et Nasser Assar exposent en 1953, grâce à Alvard, sous le titre explicite : « D’une nature sans limites à une peinture sans bornes ». Jiro Yoshihara (1905-1972) crée le groupe GUTAÏ (incarnation) en 1955. Le mouvement s’éteint à la mort de son initiateur.
Les abstraits
Henri Michaux
(1899-1984) est un artiste parfois surréaliste, parfois informel. Dans ses aquarelles, gouaches, huiles, apparaissent de grandes taches confuses qui se prolongent par des éclaboussures d’encre. Par ailleurs ses graffitis nerveux ou idéogrammes, proches de la calligraphie orientale, deviennent signe.
Hans Hartung
(1904-1989) réalise des aquarelles colorées, des gouaches, des pastels, des craies, des fusains, des encres de Chine, des œuvres au crayon de couleur sur papier et des huiles sur toile. Il s’exprime par des traces graphiques énergiques, souvent noires. Sut ses toiles récentes il utilise l’acrylique, dans des tons dominants de bleu, vert, jaune, presque toujours animés de traces noires.
Jean Atlan
(1913-1960), artiste fasciné par la matière picturale, réalise des empâtements de couleurs rayées, frottées.
Pierre Soulages
(né en 1919) choisit presque exclusivement le noir (peinture à l’huile ou brou de noix) en de larges aplats comme principal moyen d’expression. De larges traces alignées ou enchevêtrées, réalisées en un geste bref, fixent le plein instant dans une œuvre « monolithique et indivisible » (Dora Vallier), réalisée au pinceau, au couteau. à la brosse et à la spatule. Plus tard il introduit les couleurs ocre, bleu e: rouge sombre.
Gérard Schneider
(1896-1986), peintre d’origine suisse, affirme que « le peintre libère ce qui est en lui, mais n’a pas de nom ». Toutes ses toiles s’intitulent Opus et se composent de noir et de couleurs vives ou au contraire éteintes.
Olivier Debré
(1920-1999) aborde l’abstraction en 1943. Il peint de larges aplats modelés au couteau puis des monochromes ponctués de rares traces épaisses et colorées.
Espagne
Antoni Tapies
(né en 1923) réalise des recherches de matière avec empâtements et « grattages ». Il mêle aux couleurs à l’huile du marbre pulvérisé, du sable, des couleurs en poudre pour représenter de vieux murs délabrés dans une matière dense, imperméable, plissée, ridée, rayée, lourde, prête à couler.
Antonio Saura
(1930-1998), Rafael Canogar (né en 1935), Manolo Millarès (1926-1972), Luis Feito (né en 1929) et le critique José Ayllon constituent le noyau du GROUPE EL PASO (en espagnol « le pas » ou « le passage »). Actifs à Madrid entre 1957 et 1960, ils privilégient l’esthétique informelle et l’ouverture internationale dans une Espagne franquiste. Saura, impulsif dans sa peinture, représente ses émotions brutes et primitives dans des teintes noires, brunes et blanches (Ecorché I). Millarès travaille la toile par froissage, perforation, boursouflage, coutures, puis la peint en noir, rouge ou blanc.
États-Unis et Canada
Sam Francis
(1923-1994) est le principal représentant du TACHISME. De vigoureuses taches de couleurs, décidées par le hasard, claires ou foncées, créent des espaces mouvants imprégnés de spontanéité et d’une vie intense. À la fin des années soixante, il sépare les taches de couleurs qu’il repousse vers les bords de la toile pour faire « éclater la forme ouverte » du blanc.
Jean-Paul Riopelle
(1923-2002), peintre canadien de paysages abstraits, utilise la technique tachiste puis s’intéresse à 1’« égoutture dirigée » qui aboutit à l’usage direct de la peinture qui sort du tube, étalée au couteau. Il traduit un jeu de mosaïques enchevêtrées et colorées. Plus tard, il introduit la calligraphie, des lignes souples, mauves et noires.
LES CALLIGRAPHES
États-Unis
Mark Tobey
(1890-1976), dans les années trente, s’initie à la philosophie zen, à la calligraphie orientale et à la signification spirituelle, universelle et cosmique du parcours ininterrompu de la ligne calligraphique dans l’espace. Il privilégie l’encre de Chine et le lavis. Il aboutit à 1’« écriture blanche », multitudes de traits souples ininterrompus ou non. Presque tout l’espace de la toile est habité par ces traits posés avec une rapidité extrême qui construisent la forme, totalement abstraite et purement rythmique. Selon des écrits anciens de la dynastie chinoise Song, les traits verticaux doivent être « comme des aiguilles », les cercles « comme des gouttes de rosée », les courbes « comme des éclairs qui jaillissent », les obliques « comme des oiseaux qui prennent leur envol ».
Allemagne
Julius Bissier
(1893-1956) réalise de larges traits au lavis et à l’encre de Chine qui traduisent ses angoisses face au nazisme. Plus tard il peint dans la tradition zen des « Miniatures » aux couleurs délicates. Il invente une nouvelle technique, la tempera à l’œuf et à l’huile. Il lave une couleur ou l’enrichit après l’avoir posée sur la toile.
France
Jean Degottex
(1918-1988) évolue entre la calligraphique d’inspiration zen, les toiles incisées, brûlées, estampées, etc., et son gigantesque monochrome blanc où une seule couture est visible.
ŒUVRES
La Grenade bleue
Wols, 1946, Musée national d’Art moderne,
Centre Georges-Pompidou, Paris.
Tête d’otage n° 11
Fautrier, 1944, collection Galerie Limmer, Fribourg-en-Brisgau.
Les Capétiens partout
Mathieu, 1954, Musée national d’Art moderne, Centre Georges-Pompidou, Paris.
Figure jaune, personnage sur fond sépia
Michaux, 1948, Musée d’Art moderne de la Ville, Paris.
Composition 1935-1
Hartung, 1935, Musée national d’Art moderne, Centre Georges-Pompidou, Paris.
La Kahena
Atlan, 1958, musée d’Art moderne de la Ville, Paris.
Peinture
Soulages, 1948, Musée national d’Art moderne, Centre Georges-Pompidou, Paris.
La Grande Équerre
Antoni Tapies, 1962, musée de l’Art abstrait espagnol, Cuenca.
In Lovely Blueness I
Francis, 1955-1957, musée d’Art moderne de la Ville, Paris.
Broadway
Tobey, 1936 Metropolitan Muséum of Art, New York.
Vidéo : Les mouvement dans la peinture : Art informel
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